Agacement du dimanche

Prologue –

Ce matin, j’ai extrait une story de mon compte Instagram afin de la partager sur le mur de mon profil Facebook.

Je n’y ai que des amis ou des amis d’amis. Si mon réseau est étendu, il s’agit, pour ce qui est de la partie technique, d’un profil personnel.

En terme de contenu, j’y livre quelques morceaux choisis de mon quotidien : mes check-ins à la salle de sport, quelques selfies, des photographies d’ambiance ou mettant en scène ma main autour d’une bière.


Je ne me cache pas.

Une partie de mon métier consiste à « faire du beau ». Naturellement, je partage quelques photographies inspirantes trouvées sur Instagram en copiant puis collant leurs URLs.
Parfois, en utilisant le bouton Facebook « partager » prévu à cet effet, je redistribue des articles que je trouve passionnants, beaux ou informatifs.

Si je fais quelques ponts entre mes différents réseaux, à chaque média, sa fonction et son utilisation. Ainsi ma relation avec LBC est plutôt discrète sur Facebook. Seuls quelques réponses et commentaires laissent percer ma grande… personnalité.

En ce début d’après-midi, un homme (à ranger dans la catégorie « ami d’ami », notre niveau d’interaction est assez faible), a laissé un commentaire sous le screen de ma story, textuellement : « Qui a écrit ? ».

En privé, je lui ai précisé que les deux lignes qu’il flattait étaient ma production.

Voici sa réponse « Hello, Avec cette manie populaire d’emprunter aux autres, on aurait pu en douter. Je trouvais ça bien écrit. Voilà tout. »

Il ne s’agit pas de susceptibilité exagérée et cela n’a aucun rapport avec l’approche de mes menstruations mais je me pose certaines questions que je pense intéressantes à partager.

À vrai dire, je pense avoir les réponses mais j’aime cette formule – à l’apparence plus humble – du questionnement et l’approche presque psychanalytique du procédé.

Si un contenu est partagé, il est forcément produit ? Produit par quelqu’un ? Pourquoi ce quelqu’un ne serait pas… moi ? Qu’est-ce que je représente pour cet homme qui me connaît à peine ?

Pourquoi me demander « Qui a écrit ? » en public, pourquoi de pas questionner : « Est-ce de toi ? Si c’est le cas je trouve ça sympa ! » en privé ?

« On aurait pu en douter. »

Qui est « on » ?

Il y a 10 jours, j’ai investi pas mal de temps à expliquer à plusieurs personnes propriétaires de compte Instagram dont l’objet est la curation de contenu – qui avaient repris quelques textes dont j’étais l’auteure (et qui ne souhaitaient pas m’identifier sur ceux-ci) – que si je comprenais que réaliser un bon sourcing sur Internet en créditant correctement artistes et créateurs de contenus, était parfois délicat, la propriété intellectuelle, restait quelque chose de très important.

Ses enjeux sont si importants que je ne comprends pas comment, après avoir retrouvé l’auteur.e d’un post jusqu’alors orphelin, on pouvait persévérer en refusant de l’identifier, le nommer.

Rien n’est gratuit. Si t’es content d’acheter tes fringues pas cher chez H&M, c’est que quelqu’un le paie par ailleurs.


Sur Internet, je suis plutôt victime que bandit.

J’ai du mal à recevoir cette intervention pleine d’a priori qui, dans l’ignorance la plus totale de qui je suis et ce que je fais, part du principe que je suis du côté bandit. Bandit barbare qui méprise ou ignore le droit.

« Je trouvais ça bien écrit. »

Quelque chose me gêne ici aussi.

Quelque part je suis flattée et quelque part la remarque sonne comme une critique, un jugement qui tombe sans qu’on ne le sollicite vraiment. Je ne connais pas bien ce monsieur, qui est-ce ? Qui est-ce dans la littérature pour me « valider » ? Cette justification n’est-elle pas insultante ?
Entre les lignes : C’est évident, c’est bien écrit, cela ne peut pas venir de toi.

Bien sûr, un article complet sur ce non-événement pourrait laisser penser que je suis une fille compliquée et que j’ai du temps à perdre. En réalité, toutes ces lignes, c’est ce qu’il se passe dans ma tête en 3 secondes.
En 3 secondes, j’ai un mauvais goût dans la bouche.
Ces 3 secondes m’agacent et remettent en question des années d’effort et me rappellent des moments pas cools de ma vie professionnelle.

Je suis trop minette, trop sportive, trop juste bonne à faire des blagues de cul et chauffer des espaces de commentaires Facebook comme on chauffe une salle de fêtes un soir de loto-bingo pour savoir faire autre chose ?


La perversion de ces compliments qui n’en sont pas…

Ceux qui les émettent, bien souvent, se défendent de toute mauvaise volonté et évoquent le mécanisme – alors pratique – de la surinteprétation. Devant cette mauvaise fois persistante, j’ai envie d’insulter leur intelligence voyant qu’il insultent à nouveau la mienne.

Agacement du dimanche ou sexisme ordinaire ?